jeudi 13 mars 2014

Atelier d'écriture: Hiberner

Nous les humains, nous ne connaissons pas l'hibernation.

Pourtant depuis l'Antiquité, depuis que Perséphone est descendue aux Enfers, nous avons bien du mal à nous lever tôt en hiver, nous avons envie de rester près du feu, sous nos lainages nos gestes se ralentissent...et parfois nous aimerions être des animaux qui savent se couvrir de poils et dormir jusqu'au printemps!



Et si nous hibernions?

Ou plutôt: si nous hibernions ce soir à travers nos personnages?



Ces personnages sont peut-être des animaux, pour lesquels l'hibernation est naturelle: que se passe-t-il en eux quand l'automne arrive, ou quand le printemps commence? Et que se passe-t-il pendant leur sommeil?



Ils peuvent aussi être des humains: quelles seraient leurs sensations s'ils arrêtaient toute activité jusqu'à s'endormir?

Et pourquoi, comment, quand, se mettraient-ils à hiberner? Serait-ce volontaire, individuel, irrépressible, convenance sociale? Comment seraient les relations entre eux? Comment seraient la vie, la ville, la société, si ce rythme s'étendait à toute chose?



Contrainte: placer dans chaque paragraphe du texte une phrase de la "litanie exquise" d'aujourd'hui.

Tous les ans, j'appréhende les feuilles brunies, les jours qui s'étiolent et les rituels qui accompagnent ces phénomènes naturels. Tous ces piaillements autour de moi me sont chaque année de plus en plus insupportables! J'entends sans cesse des "Quand je dors, je me promène dans de vastes prairies de bonheur insoupçonné" ou des "Quand je dors, il n'y a plus de vide, j'abandonne ma solitude".

Sauf que quand je dors, moi, ce n'est pas du tout la même chanson! Quand je dors, des ombres dansent et hantent mon sommeil! Avouez que ce n'est pas bien gai, surtout quand votre nuit dure 3 mois! Alors, dès que les préparatifs débutent, je sens l'angoisse monter. Faire des réserves en se gavant de nourriture dégoulinante et grasse, vérifier son stock d'édredons et d'oreillers en plume d'oie de Laponie et surtout régler toutes les factures et les affaires en cours. Mes parents m'ont proposé de parquer ma voiture dans leur cour, tous mes prélèvements sont planifiés, ma mère m'a livré une montage de choux à la crème et dans 2 jours, commence mon calvaire...

Comment leur faire comprendre que quand je dors, je redeviens un enfant? Un sans défense, un dépendant, un en attente. Que j'ai la sensation de perdre des instants précieux et de laisser filer une vie déjà courte. Alors oui, ce sont les règles, une contrainte universelle, un indispensable pour l'humanité. Notre planète a besoin de respirer et de recharger ses batteries. Et surtout d'échapper un peu à l'Homme. Mais Est-ce vraiment la bonne solution? N'y avait-il pas des sacrifices autres à faire avant cette hibernation forcée? Quand je pense aux dauphins qui voguent dans des eaux redevenues claires, quand je pense aux biches qui broutent une herbe débarrassée de pollution ambiante, je sais pertinemment que c'était une décision vitale. Malgré tout, quand l'herbe dort, je redeviens néant. Quand elle respire, je cesse d'exister et cela me terrifie.

Il me reste 2 jours pour élaborer le plan parfait. Trouver un terrier où attendre le temps qu'un sommeil profond gagne toute la population. Réfléchir à un moyen de survivre à cette inactivité totale sans polluer ni déranger la faune et la flore. Nos néfastes habitudes sont bien compliquées à contourner. 3 mois de solitude et d'air pur, cela me laisse rêveur! Parce que j'imagine que quand je dors, dansent les arbres dans la nuit endormie. Et que je me consume de l'envie de partager ces moments qu'on ne connait que dans les lourds volumes qui peuplent nos bibliothèques.

Cà y est, ce soir, je plongerai dans un nuit longue d'un trimestre. Enfin c est ce qu'ils croient tous. Je me réfugie dans une petite cabane au fond des bois échappant ainsi à la vigilance des autorités compétentes. J'attends. Longtemps... Pour être sûr que les résistants au sommeil soient tous avoués vaincus. J'attends encore puis j'entends une vie autre qui prend possession des alentours. Une vie sereine ponctuée de bruissements d'ailes et de craquements de brindilles. Quand ils dorment tous, tout prend vie dans un tumulte sans nom...

Je risque donc un pied hors de mon refuge secret. Je respire un air déjà épuré. Quand soudain, j'aperçois un rayon qui fonce à toute allure vers une cible, qui ne semble autre que moi. Je me désagrège instantanément...

Et j'émerge enfin d'une nuit agitée quelques minutes avant que mon réveil ne sonne le glas et ne m'indique qu'il est temps d'aller travailler!






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